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La socialisation du chat

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Lorsque l’on accueille un chaton ou un chat adulte, son tempérament, son seuil émotionnel et ses échanges affectifs dépendront de son niveau de sociabilité ! Ce terme complexe recouvre une multitudes de notion et fait appel aux diverses expériences vécues par le chat dès sa naissance. Est-ce irréversible ou peut-on améliorer la sociabilisation de son chat. Gwendoline LE PEUTREC-REDON, comportementaliste spécialiste des relations Homme/Chat, nous éclaire sur la situation.

Socialisation ou sociabilisation ?

On entend à tout va le terme de socialisation par les éleveurs mais qu’est-ce qu’il signifie et surtout est-il bien employé ?

La socialisation intervient pendant la petite enfance du chat, dans son premier mois de vie, c’est le moment où il intègre le fait qu’il appartient à l’espèce féline, qu’il va apprendre à s’intégrer socialement en tant que chat. C’est-à-dire : communiquer comme un  chat, se reproduire avec les membres de son espèce, connaître les règles régissant les comportements félins. Cela se perpétue jusqu’à ses 3 mois environs.

La sociabilisation est le moment qui intervient après le premier mois, où le chaton apprend des codes de communication spécifiques mais surtout comment il va réagir aux expériences vécues. Ainsi, tout ce que le chaton va vivre et sa façon de réagir, les piliers de référence (mère/fratrie) va construire son tempérament et ses futures prédispositions à appréhender les évènements.  Plus un chaton va vivre d’expériences enrichissantes, non traumatisantes puisque d’intensité modérée, plus il sera sociabilisé et habitué à réagir sereinement aux nouvelles choses rencontrées.

Ainsi, un chat pourra être correctement socialisé puisqu’ayant vécu avec sa mère et sa fratrie jusqu’à l’âge de 3 mois minimum, ne sera pas forcément correctement sociabilisé si les expériences vécues et stimulii rencontrés sont pauvres.

Phases de développement du chaton

Les apprentissages de socialisation et sociabilisation ne se feront correctement que si le développement physiologique du petit animal est complet. Cela implique que si le chaton a des troubles moteurs par malformations congénitales ou qu’il connaît des maladies qui perturbent son développement, les expériences vécues en seront aussi troublées.

Pendant la période pré-natale, le chaton va développer une sensibilité tactile pour ensuite faire place à l’ouverture des yeux entre le 7ème et 14ème jour. Dès la deuxième semaine, l’orientation auditive et le début de locomotion ouvre réellement le chaton au monde sensoriel (l’umwelt). A la troisième semaine, l’olfaction devient efficace et le chaton acquiert sa thermorégulation. Au bout d’un mois, le chaton commence les jeux sociaux complexes avec intégration des réponses éxtérieures. L’apparition des comportements de prédation, la mise en place de cycle de sommeil circadien et les jeux avec des objets vont de pair avec la 5ème semaine de vie. Les séquences de chasse et premières notions d’acquisition des auto-contrôles commencent entre 7 et 8 semaines.

Dès ses 2 mois, le chaton est complètement apte, physiolgiquement, à intégrer cognitivement ses diverses expériences pour construire sa sociabilisation.

Une bonne sociabilisation

Un éleveur et, a fortiori, toutes personnes dont la chatte met bas, devrait connaît ces phases pour offrir une bonne sociabilisation aux chatons. En effet, il ne suffit pas de garder un chaton auprès de sa mère pendant 3 mois pur que celui-ci soit un être équilibré.

Dès la gestation, des massages légers du ventre de la chatte permettent une meilleure sensibilité tactile. Après la naissance, manipuler le nouveau-né dix minutes chaque jour par des caresses légères rendra le chat plus apte aux échanges affectifs, cela s’appelle le « handling ».

Quand le chaton s’éveille au jeu (1 mois), lui présenter divers objets, bruits ou odeurs renforceront ses capacités cognitives et surtout son seuil d’homéostasie sensorielle. L’homéostasie étant le niveau émotionnel ou physiologique le plus adéquat pour l’individu en question. Ce seuil est différent pour chaque chat, en fonction de ses expériences, ce qui fera qu’un chat supportera mieux que d’autres certains évènements.

 Pour peu, bien sûr, que ces stimulii soient progressifs et limités ainsi on habitue l’animal. Certaines personnes, qui veulent bien faire, présentent beaucoup de stimulii mais ils ont trop forts, trop répétés ou trop intenses ce qui va sensibiliser le chat et le rendre craintif ce qui est contraire à l’effet recherché.

Pour que la sociabilisation soit efficace, il faut donc faire connaître au chaton plusieurs stimulii mais qu’ils soient légers et progressifs. Comme aucun biotope n’est parfait, quand on choisit un chaton, que ça soit chez un éleveur ou un particulier, il faut privilégier un milieu de vie qui soit le plus proche de ce qu’on aura à offrir au futur compagnon à 4 pattes.

Si on vit dans un appartement parisien, sans enfant, sans terrasse, on évitera le chaton né à la campagne ayant accès à l’extérieur !

Et à l’âge adulte ?

Le souci réside quand on acquiert un chat à l’âge adulte et qu’on a pas eu le choix d’accueillir un matou dans les bonnes conditions. Autant il est possible d’améliorer les choses, autant on ne fera pas d’un chat craintif un aventurier, d’un chat intolérant aux caresses un affectueux !

Malheureusement, les premiers mois de vie sont déterminants mais on peut toujours faire en sorte d’apporter du « mieux ». Il faut proposer au chat en question les diverses choses que l’on souhaite qu’il vive sereinement (chien/transport/kennel/câlin…) mais brièvement au départ puis un peu plus chaque jour, en veillant à ce que votre animal se sente toujours en sécurité et qu’il ait la possibilité de fuit s’il le désire. Ainsi, l’idée reçue selon laquelle il faut beaucoup câliner un chat pour qu’il devienne affectueux est le meilleur moyen pour obtenir l’inverse.

Tout doit se faire petit à petit, en tenant compte du tempérament de base du chat. Un chat de « gouttière » qui a grandi dans la nature n’aura jamais les mêmes capacités de sociabilisation à la vie de maison qu’un chaton né chez des éleveurs ou des particuliers. Le contraire est plus aisé car la vie en extérieure est le biotope de base du félin.

Dès lors, si vous avez craqué sur le chat qui vient « d’on ne sait trop où » mais qui adore se prélasser dans votre jardin et quémander quelques caresses alors éloignez toute idée de le maintenir captif dans votre maison en pensant qu’il y trouvera un meilleur confort. Sinon gare à la malpropreté et à l’agressivité qui pourraient en découler. Si vous tenez vraiment à prendre ce chat sous votre vigilante protection, proposez lui un peu de nourriture et d’eau, un petit coin couchette dans votre jardin pur l’hiver et si Minet s’aventure chez pour quelques heures de repos, veillez à ne pas l’enfermer.

Comment bien choisir son chaton

Encore une fois, il s’agira de sélectionner un chaton élevé dans les conditions les plus proches de votre mode de vie et vous assurez qu’il aura connu assez de stimulii bien dosés pour sa construction émotionnelle : chien, autre chat, enfant, voiture, cage de transport, invités à la maison, bruits quotidiens (téléphone/sonnette/musique). Et surtout, ne le séparer de sa mère avant ses 3 mois pour un sevrage affectif efficace.

Comme il n’est pas toujours possible de trouver un chaton qui aura connu tout ce qu’il sera amené à rencontrer chez vous, il faudra continuer son apprentissage une fois arrivé chez vous. Toujours en respectant cette sacro-sainte règle du « petit à petit ». Il y a parfois certaines choses, certaines personnes, certains bruits ou certains objets dont votre chat ne supportera la confrontation bien que vous ayez respecté la règle précitée : ne cherchez pas à lui imposer, il y a une explication pour qu’il ne s’y habitue pas mais, bien souvent, on ne peut savoir quelle est la raison. Il faut parfois savoir laisser certaines choses de côtés et avoir un chat bien dans ses coussinets que d’en imposer une assez traumatisante pour stresser grandement votre animal.

Avant ça se passait bien mais…

Parfois, les propriétaires sont confrontés à un chat qui vivait très bien une situation puis un facteur déclenchant, identifié ou non, est venu perturber cette belle harmonie ! Quelque fois, le temps fait l’affaire mais dans d’autres les peurs ou les répulsions s’aggravent : dans ce cas, seul un comportementaliste spécialiste des relations Homme/Chat peut vous venir en aide car il saura analyser la cause déclenchante, les facteurs aggravants, le profil spécifique du chat, l’environnement et le relationnel proposés.

Certaines personnes ont aussi constaté que leur chat appréciait les rencontres avec d’autres félins quand il était chaton mais que le temps passant, celui-ci devenant plus vieux, cela se passe de plus en mal. Cela découle du fait que le niveau de socialisation (aptitude à vivre avec les membres de son espèce) diminue avec le temps si le chat n’est pas mis en contact avec des congénères. Après 2 ans, ce niveau baisse considérablement. Ainsi, si vous souhaitez avoir un deuxième chat, pensez à l’adopter dans ce laps de temps pour que la cohabitation se passe correctement. Après tout devient un peu plus complexe en fonction des individus.

Dans tous les cas, gardez à l’esprit que tant que vous choisissez un chaton, c’est une décision réfléchie qui s’impose avec la recherche des meilleures conditions de sociabilisation et quand vous adopter un chat adulte, c’est le temps, la patience et la compréhension de ces capacités cognitives et émotionnelles qui vous donneront les meilleurs résultats.

 

 Gwendoline LE PEUTREC-REDON